[Olivier L.]

AP Asia, 13 janvier 2004.

"L'éditeur d'un manga pornographique japonais a été condamné pour obscenité, une première au Japon qui fera jurisprudence"


C'est la première fois qu'un manga, spécialité de la bande dessinée japonaise, était au coeur d'un procès au Japon. Il a
d'ailleurs déclenché une polémique sur la liberté d'expression au pays du soleil levant.

L'éditeur, Monotori Kishi, 54 ans, a été reconnu coupable de distribution d'imprimés obscènes et condamné à un an de prison avec sursis.

Mais c'était aussi la première fois depuis 20 ans que la pornographie illustrée, omniprésente dans les kiosques, en vidéo et sur l'internet au Japon était sur le banc des accusés.

Le manga porno incriminé, "Misshitsu" (La Chambre de Miel), qui s'est écoulé à plus de 20.000 exemplaires en avril 2002, dépeint crûment des organes génitaux et l'acte sexuel.

Le président du tribunal a expliqué la condamnation en arguant du fait que ce manga était "essentiellement consacré à des actes sexuels flagrants et dépeints avec force détails". "On ne peut ignorer son impact négatif sur la moralité sexuelle", a-t-il jugé.

L'éditeur, Monotori Kishi, a fait aussitôt appel au nom de la "liberté d'expression". Il estime que le verdict "contraindra les maisons d'édition à ralentir leur activité et conduira au déclin des manga".

Des universitaires et des critiques d'art distingués l'ont soutenu durant le procès, arguant qu'il n'appartenait pas à l'Etat de se prononcer sur ce qui est obscène et ce qui ne l'est pas.

[Flo]

[ElieDeLeuze]

Je crois que le rapport était plus entre le ralentissement de l'activité (pour ne pas risquer de se faire condamner) et le déclin des manga car les maisons d'éditions feront moins de bénéfices. C'est un point de vue d'éditeur, pas d'artiste. Les manga sont ce qu'on en fait, et comme dit Flo, ce n'est pas la limitation de la pornographie dans les manga qui va limiter les manga dans leur ensemble. Je pense que l'éditeur qui fait le commentaire cité par Flo parlait de gros sous, et on ne peut pas nier le fait que l'argent qu'ils se font avec le porno fait partie de la base financière qui permet d'avoir un niveau d'activité élevé dans d'autres domaines de la production de manga.

Ceci dit, ce n'est pas vraiment un bon signe qu'un juge interprète les lois japonaises dans leur sens le plus strict. Cela ouvre la porte à des sanctions pour des reproches d'ordre moral aux relents de moralisme ultraconservateur. Que les Japonais aient des manga pornos dans leurs combini ou pas, je m'en fous un peu, mais que les juges virent au moralisme aveugle comme au temps de grand maman, je ne m'en fous pas du tout.

[Flo]

Je ne me considere pas comme un "ultraconservateur" ni comme un "moraliste retrograde" mais je pense que la liberte d'expression a des limites, surtout quand il convient de parler de pornographie "publique" (ce que font les gens chez eux, en prive, on s'en fout), de races ou encore de religion.
Ces 3 themes sont trop dangereux pour etre pris a la legere. Ils dechainent les passions et sont trop souvent sources de violences.
Je ne connais pas le contenu de ce manga mais j'en ai deja feuillete d'autres dans des combinis qui etaient parfois franchement choquants (mangas mettant en scene des enfants dans des revues pour salary men en vente libre) sans etre inquietes par la loi, celui ci devait franchement etre gratine...
Je ne pense pas de mon cote que cette nouvelle soit une mauvaise nouvelle, au contraire. Il y a des fous qui ne font pas la difference entre le virtuel et le reel et ce genre de manga peut se reveler dangereux sur ces personnes. Il est donc normal de s'occuper de leurs handicap en limitant volontairement la liberte dont tout le monde parle en s'insurgeant.

S'il y a des lois, c'est parce qu'il existe des imbeciles qui agissent sans reflechir, au detriment du confort des autres.

[ElieDeLeuze]

Bon, j'admets mon côté parano. On peut en effet être libéral et tolérent sans pour autant cautionner n'importe quoi, je suis d'accord. J'ai aussi une conception française de la liberté d'expression, c'est à dire en respectant des limites de bon sens.

Je n'ai cependant jamais adhéré à l'argument des "fous qui ne font pas la différence entre le virtuel et le réel", même si je ne nie pas que la culture pornographique d'un pays laisse des traces dans les esprits. Amsterdam est certainement plus libérale que n'importe quelle autre ville, et il n'y a ni plus de viols ni plus de violence qu'ailleurs. Copenhague a du porno dans tous les kiosks et superettes, et les Danois n'ont pas à rougir de leurs statistiques de la violence sexuelle. Une culture ouverte qui assume sa pornographie démystifie beaucoup le sexe, alors qu'une culture du sexe sclérosée comme aux Etats Unis ou dans les pays méditerranéens produit des névrosés à la chaîne. Là où je rejoints ton point de vue, Flo, c'est que l'on est pas obligé de mettre n'importe quelle pratique sexuelle en rayon pour être libéral et ouvert. Limiter les représentations de violence et de viols me paraît aussi très intelligent, mais il ne faudrait pas que ce genre de jugement soit le début d'une "croisade" moraliste.

Je voulais juste dire que je ne suis pas étonné qu'un éditeur ne soit pas content quand on limite ses activités qui lui rapportent autant que le porno.

[Maitre K]

Il faudrait aussi voir le contenu...

Parce que cote manga de cul, au Japon ca y va fort. Donc pour que cet editeur ait depasse les limites de ce qui etait acceptable jusqu'a aujourd'hui, ca devait etre gratine !

Il faudrait savoir aussi si le manga avait bien ete vendu comme manga reserve aux adultes. Ce point aussi est tres sensible !
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I'm so gifted at findin' what I don't like the most
So I think it's time for us to have a toast

[le sourd]

dites moi: ce procès n'est qu'un court phénomène qui ne change rien ou c'est le début de changement des mentalités japonaises?

merci d'avance!

[FayaChonch]

Je n'ai pas eu le manga entre les mains donc je ne sais pas bien quelles genres de scenes ont peut voir en le feuilletant mais la decision de cette cours de justice est un peu etonnante je trouve...

"L'éditeur d'un manga pornographique japonais a été condamné pour obscenité"
Si c'est du porno, c'est forcement obscene. Comment pourrait il en etre autrement?...

Je suis contre les scenes de sexe avec violence, des enfants, des personnes non conscentes, etc...
mais qu'un manga porno soit ""essentiellement consacré à des actes sexuels flagrants et dépeints avec force détails" je ne vois pas en quoi est ce condamnable ?
je veux dire, si le pays n'interdit pas le porno, ce genre de manga ou des scenes de sexe sont decrites avec details (et qu'elles ne montrent pas des relations pedophiles et autres abominations de ce genre interdites par la loi; et que bien sur ces manga sont reseve et vendu a un public adulte) ne peuvent pas etre poursuivi pour "obscenite" puisque c'est l'essence meme de la pornographie: d'etre obscene, de montrer des relations sexuelles de facons crue.

On aurait pu attaquer pour "apologie de la violence", "incitation a la violence" ou autre, mais obscenite...
De meme, pourquoi l'attaquer lui et pas tous les autres?

Encore une fois, je dis ke je n'ai pas eu ce manga entre les mains donc je ne connais pas son contenu, mais c'est surtout les motifs d'accusation qui me choquent: l'obscenite dans le porno peut etre condamnable....

Et puis je ne suis pas d'accord avec le fait qu'il faille restreindre sur certaines choses sous pretexte que certains confondent virtuel et realite. Comme retirer le porno a la tele par exemple (y a eu un debat dessus recemment en France) pour pas que les enfants regardent. Mais ce n'est pas a la chaine de ne plus programmer de porno mais bien aux parents de veiller a ce que leur enfants ne regardent pas ces programmes !!
Pourquoi un enfants reste debout apres ses parents pour zapper sur du X ?! pourquoi l'enfant peut il avoir acces a ces programmes ?! Ca engage la responsabilite direct des parents car ca se fait sous leur toit ! (la je parle de la television, pour le net je sais ke ce n'est pas aussi simple)
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"Soyons réalistes, exigeons l'impossible" Che Guevara

[Olivier L.]

BBC News, 14 janvier 2004. (extraits)
Asahi.com
...

Le juge Yujiro Nakatani a estimé que le manga Misshitsu était trop explicite.
"Les corps dessinés sont présentés dans des actes sexuels explicites et le masquage des parties génitales est négligé. Cette bd est assurément un produit pornographique".

Environ 45% des livres et magazines vendus au Japon sont des manga. Ces bandes dessinées ont souvent un contenu sexuel. Et c'est la première fois au Japon qu'une bd est soumise à une procédure judiciaire pour obscénité.

La condamnation prononcée par le juge Nakatani s'appuie sur l'article 175 du code pénal japonais qui interdit la diffusion de matériel obscène. Cet article ne définit pas clairement ce qui peut être tenu pour "obscène". Cependant, la jurisprudence relative à cet article de loi fut établie en 1957 lorsque la traduction japonaise du roman de DH Lawrence "L'Amant de Lady Chatterley" fut censurée. Déjà en 1951, la Cour Suprême du Japon avait définit comme "obscène" tout ce qui est "excessivement sexuellement stimulant, qui abaisse le sentiment normal de honte de tout citoyen ordinaire, ou qui déroge aux principes élémentaires de la morale."

Les avocats de la défense ont mis en avant que certaines videos, photos ou autres documents disponibles sur l'internet sont beaucoup plus explicites que le manga Misshitsu.
Ils font aussi valoir que l'article 175 viole l'article 21 de la constitution qui garantit la liberté d'expression et de la presse.

[ElieDeLeuze]

Il semble, en fait, que la loi japonaise ne soit pas libérale du tout sur la pornographie, et c'est plus une interprétation libérale des textes qui donnent l'impression inverse. Comme quoi il ne faut pas laisser traîner de vieilles lois bien rétrogrades, car elles ne sont jamais complètement oubliées.

Puisque le jugement indique clairement que l'acte sexuel doit être caché, c'est que le porno est fondammentalement interdit. Et ça, il n'y a pas de quoi en être fier. La liberté et l'ouverture envers la pornographie est donc en danger permanent. Pardon pour le HS, mais c'est comme le cannabis aux Pays-Bas, en fait, c'est interdit, mais les politiciens ont demandé à la police de fermer les yeux, et rien ne dit que les politiciens ne demandront lui demandront pas de les rouvrir un jour... Alors un juge japonais qui nous fait une crise pour du sexe en soi (et non pas pour une forme de sexe qui irait trop loin), ça m'inquiète. COndamner le sexe, c'est choquant, surtout quand il y aurait tant d'autres aspects à condamner (violence, viols, enfants etc...)

Je ne vais pas donner de noms car il y a des mineurs sur ce forum, mais ce genre de jugement remet en question l'existence même d'artistes reconnus dans le monde entier qui ont développé un monde manga pornographique original, comme un certain célébrissime dessinateur de manga gay qui rappel le parcours d'un autre encore plus célébrissime dessinateur d'origine finnoise.