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Tsunerari Takugawa, l'héritier des shoguns

 
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tao
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Tsunerari Takugawa, l'héritier des shoguns
Note du Post : 4   Nombre d'avis : 1

Article de Philippe Pons paru dans l'édition du 29/09/04

source : http://www.lemonde.fr/web/recherche_articleweb/1,13-0,36-380943,0.html


Salarié d'une grande compagnie maritime, l'héritier des "généralissimes" qui gouvernèrent de fait le Japon de 1603 à l'ère Meiji cherche à faire connaître et à valoriser le patrimoine de sa dynastie.

Lorsqu'il travaillait au bureau new-yorkais de son entreprise, la compagnie maritime Nippon Yusen, ses collègues américains l'avaient surnommé le "shogun". "Le roman de James Clavell qui porte ce titre venait de sortir et le mot, sans que mes collègues sachent bien ce qu'il signifiait, était à la mode. On me demandait combien j'avais d'épouses et si les shoguns ordonnaient à leurs vassaux de s'éventrer par seppuku", rappelle, ironique, Tsunenari Tokugawa. Si l'histoire avait tourné autrement, peut-être serait-il le dix-huitième shogun de la dynastie Tokugawa. "Si" il n'y avait pas eu la restauration de Meiji (1868) qui chassa du pouvoir cette lignée de généralissimes, suzerains des guerriers, qui régna pendant près de deux cent soixante ans sur le Japon... Tsunenari Tokugawa est le descendant de la branche principale de la famille, c'est-à-dire des quinze shoguns qui dirigèrent le pays au cours de ces deux siècles et demi.

En dépit de famines, de révoltes paysannes et d'agitations urbaines, le règne des Tokugawa, qui a commencé en 1603, a été une époque de paix et de prospérité. Une époque à la culture florissante dont l'estampe (ukiyo-e) fut l'une des grandes expressions. Ce que l'on a appelé la "culture d'Edo" (ancien nom de Tokyo), parce que la capitale shogunale en fut la matrice, témoigne d'un degré de civilisation qui n'avait rien à envier à l'Europe à la même époque. La rapidité et la réussite du basculement dans l'ère moderne à la fin du XIXe siècle tiennent largement à la "proto-modernité" de l'époque précédente en termes d'urbanisation (Edo comptait plus d'un million d'habitants), de taux d'alphabétisation (en ville, les deux tiers des hommes et la moitié des femmes savaient lire) et de capitalisme marchand.

Ayant vécu enfant en Angleterre où son père était en poste, diplômé de l'université Gukushuin, établissement de l'élite nippone, Tsunenari Tokugawa a été embauché par la compagnie maritime Nippon Yusen K. K., l'une des plus anciennes entreprises du Japon. Comme la plupart des membres de l'ancienne aristocratie, abolie en 1945, il s'est fondu dans la société, devenant un salarié ordinaire. Elégant, internationalisé dans ses manières et au regard volontiers espiègle, M. Tokugawa fut désigné par son grand-père, Iemasa, pour lui succéder comme chef de la lignée. Le fils aîné de son grand-père était mort jeune et celui-ci choisit parmi ses petits-enfants le fils de sa fille aînée.

"J'avais 14 ans et j'adorais le sumo. Mon grand-père m'y emmenait une fois par an. En acceptant de devenir chef de la maison Tokugawa, j'ai pensé que j'irai plus souvent voir les tournois !" Il deviendra chef de la maison Tokugawa à 23 ans. Mais ce n'est que plus tard qu'il prit conscience de la signification de ce choix. "Un jour, au cours d'une réception aux Etats-Unis, un spécialiste du Japon me dit : "Je ne comprends pas votre pays. En Europe, votre ancêtre Ieyasu - le premier shogun Tokugawa - serait un héros national. On lui élèverait des statues. Au Japon, il est considéré avec dédain." Ce commentaire m'a fait réfléchir. J'avais 31 ans, et dans ma famille, sans renier quoi que ce soit de notre passé, nous préférions garder un profil bas."

PATRIMOINE EN CAISSES

Depuis l'ère Meiji, dont les oligarques devaient légitimer leur prise de pouvoir en rabaissant le régime précédent, puis sous l'influence des historiens marxistes, l'époque Tokugawa avait été présentée comme "féodale", "obscurantiste", "vulgaire". En réalité, les deux siècles et demi de quasi-fermeture de l'Archipel furent une période de bouillonnement intellectuel, marqué par un goût du savoir qui rappelle celui des Encyclopédistes et par l'épanouissement d'une culture populaire conjuguant esthétique et fonctionnalité et constituant l'un des héritages culturels les plus importants du Japon moderne. "Moi aussi, il m'a fallu du temps pour mesurer l'importance de cette époque", reconnaît Tsunenari Tokugawa. Afin de présenter le patrimoine de sa famille, il a créé il y a deux ans la Tokugawa Memorial Foundation. "Cette fondation a pour but de répondre aux demandes des chercheurs qui souhaitent avoir accès au patrimoine culturel et historique de ma famille ; j'ai créé un modeste prix pour les encourager."

Le tombeau des Tokugawa à Nikko, au nord de Tokyo, et les deux musées privés des branches collatérales de la famille (Mito et Owari) donnent une idée de richesse culturelle du patrimoine des Tokugawa. Mais pour la lignée des shoguns, il n'y avait rien. "Les branches collatérales avaient leur domaine dans les départements actuels d'Aichi et d'Ibaraki. Aussi ont-elles pu, après la restauration de Meiji, conserver leur patrimoine et plus tard le mettre en valeur. Dans notre cas, nous avons été chassés de là-bas", explique M. Tokugawa en indiquant de la main le palais impérial, à deux pas du siège de Nippon Yusen, qui était le château des shoguns. "Le dernier shogun est parti dans la précipitation en laissant beaucoup de choses. Le reste a été entreposé dans des caisses et des malles. Mais une partie a péri dans les bombardements américains sur Tokyo - en mars 1945, le nord-est de la capitale a été réduit en cendres par des bombes incendiaires qui ont fait près de 200 000 morts et disparus : un holocauste comparable à celui des bombes atomiques -. Et, longtemps, ce qui a subsisté (œuvres d'art, kimono, objets en laque, céramique etc.) n'a pas été inventorié."

L'ambition de Tsunenari Tokugawa de faire connaître le patrimoine de sa famille bénéficie d'un climat favorable : la redécouverte par les Japonais d'une époque longtemps négligée. Le goût d'Edo est resté longtemps le fait d'écrivains nostalgiques ou l'objet de poussiéreuses recherches académiques. Puis, dans les années 1980, on a assisté à un "boom d'Edo" : une fascination pour la culture de l'époque des Tokugawa dans laquelle les Japonais cherchaient des racines autochtones à leur modernité et qui se traduisit par la construction du Musée Edo-Tokyo et la publication d'une multitude de livres.

"On connaît bien entendu les grandes expressions artistiques japonaises (le théâtre, les estampes, l'art du thé, l'architecture, la céramique), poursuit Tsunenari Tokugawa, mais on connaît plus mal, même parmi les Japonais, le contexte socio-historique dans lequel elles sont nées ou se sont affinées. Alors que les Européens se battaient entre eux et allaient coloniser l'Afrique et l'Asie, le Japon des Tokugawa donnait naissance, dans un climat relativement pacifié, à une culture de haut niveau."

Biographie

1940
Naissance au Japon. Sa famille part s'installer à San Francisco.

1941
Pearl Harbor. Retour au Japon.

1959
Etudes à Londres.

1971
En poste à New York.

2003
Crée la fondation Tokugawa.


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Le généralissime et l'empereur

Loin d'être un personnage falot, le vrai dernier shogun, Yoshinobu Tokugawa (1837-1913), fut un homme attachant et solitaire, soucieux d'éviter la guerre civile. Telle est la figure de "dirigeant éclairé" que brosse Ryotaro Shiba dans son roman historique Le Dernier Shogun (éd. Philippe Picquier). Au milieu du XIXe siècle, le Japon est contraint à s'ouvrir par les bateaux étrangers pointant leurs canons sur ses côtes. Yoshinobu tente des réformes, mais prend conscience que le régime shogunal ne pourra pas faire face à la pression étrangère ; et, en dépit du soutien de pays comme la France, son armée plie devant celles des fiefs rebelles unis sous la bannière de la "restauration" du pouvoir impérial. En avril 1868, il capitule, laissant la place au descendant d'un empereur dont son aïeul, Ieyasu, avait reçu en 1603 le titre de shogun (généralissime). A la suite de sa victoire en 1600 sur les autres seigneurs, mettant fin à plus d'un siècle de guerres civiles, Ieyasu, qui s'était constitué un puissant domaine dans la plaine du Kantô (région de Tokyo), disposait d'une hégémonie sans partage. Le mot shogun, qui à l'origine désignait le commandant des armées envoyées pacifier les barbares, devint synonyme de détenteur du pouvoir militaire. Ieyasu instaura un système fondé sur la succession héréditaire du shogun et la vassalisation des baronnies. Le nouveau régime relégua l'empereur dans sa fonction sacerdotale traditionnelle, dont il ne sortira qu'à l'époque Meiji pour devenir un souverain moderne dans les "habits neufs" que lui taillait la nouvelle Constitution. Plus qu'une "restauration" du pouvoir impérial, s'opéra alors ce que les historiens épinglent comme une "invention de la tradition".
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  Répondre en citant   29 Sep 2004 18:18
Aristarque
5eme Dan
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Citation:
"Je ne comprends pas votre pays. En Europe, votre ancêtre Ieyasu - le premier shogun Tokugawa - serait un héros national. On lui élèverait des statues.


à défaut de statue, on a fait un monument à la mémoire de ses lunettes :
Cf mon message du 15 septembre dans ce fil :
http://www.forumjapon.com/forum/viewtopic.php?t=5044
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  Répondre en citant   29 Sep 2004 22:13
Aristarque
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Il existe aussi un Musée Tokugawa à Nagoya, faisait remarquer un lecteur du "Monde" dans un courrier publié samedi 9 octobre.

http://www.cjn.or.jp/tokugawa/
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  Répondre en citant   11 Oct 2004 14:02
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